Le mouvement des inscriptions sur les listes électorales est un bol d’air pour la démocratie. Ce sursaut citoyen est né après les émeutes de novembre 2005. Pendant la crise, les pouvoirs publics ont cherché à établir des contacts pour pallier au vide politique et reprendre la main sur une situation, qui prenait au fil des jours, un chemin catastrophique. L’extrême gravité des événements, l’inexistence de représentants fiables, l’opportunisme des uns et les arrières pensées politiques des autres ont exacerbé les pratiques clientélistes.
Aujourd’hui, nous devons prendre en compte toutes ces nouvelles dynamiques, engager un travail de fond avec ces nouveaux acteurs pour inscrire certaines de leurs propositions dans les politiques publiques à venir. Toutefois, il ne faut pas tomber dans la stratégie du poker menteur imposée par certains. La culture du rapport de force doit être proscrite. Faisons de la politique, pas du commerce. Personne n’est propriétaires des voix. Ces nouveaux acteurs ont impulsé ce mouvement, mais la véritable prise de conscience prend sa source dans le double choc d’avril 2002 et des émeutes de 2005, car le malaise est profond et l’envie d’avoir prise sur son destin est grande.
La conséquence positive de cette conjonction est que l’abstention en avril prochain sera sans doute la plus faible de l’histoire de la 5 ème république. Le débat politique en France est monopolisé par « les petits fonctionnaires » et « les classes moyennes ». Le défi pour la classe politique est de se réapproprier cette parole venue des banlieues, de l’installer dans le débat public et de lui donner un sens politique.
Dans ces conditions, quel rôle pour les associations ? Les grandes associations ont les moyens de se faire entendre, elles disposent de salariés dont le principal objectif est d'être l'interface avec les pouvoirs publics, de défendre leurs intérêts et de trouver les chemins dans le labyrinthe administratif pour avoir accès aux subventions. Elles ont donc un savoir faire politique et utilisent les leviers à leurs dispositions. On pourrait presque dire que ces associations se sont "notabilisées", certaines se sont éloignées de la base. Par contre, la frustration est à chercher chez les petites associations portées à bout de bras par une, deux ou trois personnes dans des territoires où le bénévolat est un animal disparu depuis belle lurette, exterminé par d'autres urgences matérielles. C'est à ce niveau que la demande est grande et que l'offre institutionnelle semble lointaine, procédurière et complexe. D'où l'impression d'abandon et de clientélisme vécus par certains et la naissance d'une forme de discours vindicatif voire radical. Il faut inventer une autre approche pour impulser et accompagner des initiatives naissantes, pour synchroniser le tempo administratif et politique avec l'engagement des citoyens, même si celui-ci n'est que temporaire, parce qu'une action réussie donne envie d'aller plus loin.
L’idée qui consiste à penser que tel collectif ou telle association représentent les quartiers ou exercent une influence déterminante est fausse. Les habitants des banlieues ne sont pas un bloc monolithique qui répond au doigt et à l’œil. On peut se construire une légitimité médiatique, en quelques mois, sans pour autant recueillir une réelle sympathie sur le terrain. Paradoxalement, l’omniprésence médiatique de certains leaders crée un mélange de suspicion et de rejet chez les habitants des quartiers. La mécanique médiatique impose une représentativité qui n’existe pas dans les faits et encore moins dans l'esprit des citoyens.
S’agissant du diagnostic socio-économique des quartiers, nous ne manquons pas de ressources, encore moins d’experts sur toutes ces questions. Le secteur s’est professionnalisé ces dernières années, des grandes fédérations associatives œuvrent au quotidien, les élus locaux ont acquis une expertise sur beaucoup de dossiers, les leviers législatifs régionaux existent, la blogosphère fourmille d’initiatives, les syndicats étudiants, lycéens, les conseils de jeunes sont des entrées possibles. Toutes ces strates attendent une orientation politique affirmée, décentralisée et un engagement pérenne de l’état. Les différents collectifs ou mouvements spontanées peuvent tout à fait trouver une place de choix dans les dispositifs locaux si on fait preuve de souplesse et de réactivité dans le cadre de la mise en place d’un «plan d'investissement massif» que certains demandent depuis longtemps.
La situation sociale des banlieues exige une « offre politique visible » qui tranche avec les slogans fourre tout. Nous devons tenir compte des enseignements des événements récents pour faire bouger les lignes. Tout se passe comme si un soupir de soulagement traverse actuellement le pays sur cette question avec cette impression que la balance peut pencher d’un côté comme de l’autre. Cette fébrilité est une vague sur laquelle surfent quelques responsables de collectifs vis-à-vis des pouvoirs publics ou des représentants de partis politiques… .
Bienvenue sur la blogosphère.
C'est une nouvelle aventure qui démarre pour vous (un puit sans fond) mais maintenant, vous avez accès potentiellement à des millions de lecteurs et d'auditeurs... alors, il va falloir aller les chercher.
Bon courage.
Rédigé par : M. | vendredi 09 février 2007 à 10:47
sacré chantier !
Rédigé par : l'oeil | samedi 10 février 2007 à 13:58